Brindacier arriva très tard aux portes du château, son baluchon sur l'épaule et le coeur serré : elle avait eu le temps de dégriser en marchant à travers la forêt, et se demandait si l'invitation de Sacrai à habiter au château n'était pas un pur délire de son imagination.
- Mais non, se répétait-elle, je dois habiter dans l'aile ouest, il m'a même fait un croquis de ma chambre. Je ne peux pas inventer tout ça, quand même. Mais qu'est-ce qu'il est imposant ce château, je me demande si j'y trouverai mon chemin! Et ce garde, oula, il n'a pas l'air de rigoler...
- Rigoler, tu parles, lui chuchota une petite voix intérieure, n'y pense pas pour l'instant. Avec tes haillons déchirés sur le corps, tu as l'air de ce que tu es, une vagabonde, une pauvresse, une mendiante : le garde va te balayer d'un coup de lance...
- Pas du tout! Je ne suis plus une vagabonde: j'ai reçu un champ de la mairie aujourd'hui. Un champ! Et tout ça grâce à Sacrai... Quelle chance de l'avoir rencontré! Ce garde ne doit pas être si méchant, puisque son maître est si gentil...
Et prenant son courage à deux mains, Brindacier s'avança vers le garde et se présenta à lui.